Entre la vie et l'oubli [libre]

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Haneko se dirigea vers la bibliothèque d'un air décidé. Il lui fallait finir un devoir en cours et il n'y avait que là-bas qu'elle pourrait y trouver les documents dont elle avait besoin. Tandis qu'elle pénétra dans le repaire, elle ne put s'empêcher de se dire que sa vie était vraiment monotone. Tous les jours le même rythme, les mêmes paroles, les mêmes actions. Elle aurait bien voulu que cela change mais cela lui était impossible de modifier les règles établies jusqu'à lors. Alors l'adolescente devrait se faire au faite que son existence se déroulerait dans l'ombre de tous parmi la foule des lycéens. La princesse tourna dans le couloir à sa droite en direction de la littérature japonaise. Un peu d'inspiration pour la rédaction ne lui ferait que du bien. Elle emprunta le premier livre qui attira son œil et s'installa sur une table présente à cet effet. Son maintien était droit, seule une mèche rebelle cassait l'image de perfection imposée par sa famille. Ses douces prunelles décryptèrent rapidement le texte devant elle et en tirèrent le maximum d'information en peu de temps. C'était enfin fini.

* Maintenant je peux me détendre un peu. *

Tout en se levant, elle prit le livre et épousseta sa jupe. Aller le reposer ne fut pas long et elle put partir vers de nouvelles activités. Ce matin, sa grand-mère paternelle avait eu un mauvais pressentiment sur la journée à venir et bien qu'elle ne se trompe que très rarement, Hane n'avait pas pris la peine de l'écouter. Elle aurait dû malgré tout écouter l'avertissement des ses ancêtres. En repartant de là où elle était venue, Haneko bouscula une pile immense de livres qui lui tombèrent dessus. Un bruit infernal comprenant le cri de la demoiselle et les livres chutant malheureusement sur elle retentit longuement dans la bibliothèque. Le poids demeurait trop conséquent pour qu'elle puisse s'en dégager. Cela devait être la bibliothécaire qui avait dû les empiler pour éventuellement les ranger ultérieurement. Décidément, aujourd'hui n'était pas un bon jour car entre cette accident et les pensées sombres qui dominaient dans son esprit…Usant des forces qui lui restaient, elle se mit à crier :

- Au secours !!! Quelqu'un peut venir m'aider !!

De toutes ses forces, elle tentait de repousser quelques livres mais commença vite à manquer d'air et à s'épuiser plus vite que prévu. Son souffle devenait court et son rythme cardiaque chuta brusquement. Elle songea qu'à cette heure personne ne viendrait dans la salle et pourrait la sauver du mauvais pas où elle s'était mise. Dommage. On la retrouverait que trop tard et son prénom filerait directement dans la partie nécrologique du journal que lisait son grand-père : triste fin. Il fallait juste espérer qu'un rêveur en quête de lecture voulant rompre un peu avec la foule désirait se recueillir ici ou alors qu'une fanatique de la mode vienne pour échapper à ses prétendants beaucoup trop nombreux. Quoiqu'il en soit, encore quelques minutes ici et la vie d'Hashimoto Haneko n'aurait été qu'une suite étrange d'événement parfaitement banaux et sans importance…

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Eh bien, ce ne fut ni un rêveur en quête de lecture, ni un fanatique de la mode qui était entré dans la bibliothèque un peu avant que l'incident se produise. Aussi étonnant que cela puisse paraître, une petite silhouette venait de faire irruption dans la grande salle emplie de rangées de livres. L'endroit était à la fois majestueux et intimidant pour quelqu'un qui n'était vraiment pas habitué à ce genre de lieux. Les seules fois où Yu' entrait dans des bibliothèques ou des libraires, c'était pour accompagner quelqu'un. Lui, il ne lisait pas, voir presque pas, ça ne l'intéressait nullement, ou peut-être juste pour les romans d'aventure qu'il ne finissait jamais en fin de compte... Il fallait le comprendre ce pauvre petit, son cas était à la limite de l'hyperactivité et il montrait depuis toujours d'énormes difficultés à se concentrer sur quoi que ce soit, hormis la cuisine.

Mais alors que pouvait faire cet énergumène ici, maintenant? Eh bien, en réalité il lui fallait absolument une information concernant un mode de cuisson dont il n'avait plus vraiment des souvenirs exacts, car c'était tellement rare qu'on l'utilise que finalement on ne s'en rappelait plus. Pourtant il fallait l'apprendre à ses "amis", alias élèves, parce que c'était dans le programme. Mais quel professeur étrange que voilà! Premièrement, il n'avait vraiment pas l'apparence de quelqu'un qui pouvait enseigner lorsqu'on le voyait avec ses jeans larges et ses T shirts qui semblaient tous avoir passé dans un sac de farine à la fin de la journée, sans compter le fait que son allure générale se fondait très bien avec celle d'un étudiant. Le seul moyen d'avoir un doute sur ce fait était qu'il n'avait pas d'uniforme... Il était plus probable que monsieur ait été un membre du personnel de nettoyage lorsqu'on le voyait, et pourtant non, ce gamin donnait des cours aux filles de Musume, ce qui au passage lui procurait beaucoup de plaisir. C'était bien plus plaisant que de faire le service dans un restaurant en France ou en Angleterre.

Tandis qu'il déambulait dans les rayons en tentant de comprendre comment étaient classés les livres afin de trouver celui qui l'intéressait sans avoir à demander à la bibliothécaire qui lui faisait un peu peur en raison de sa tête de dindon, le blond fut interloqué par un son tonitruant non loin de là.

- Hein?

Curieux de voir de quoi il s'agissait, Yu' se dirigea en direction du bruit et tomba nez-à-nez sur un tas de livres qui avaient dut tomber.

- Au secours !!! Quelqu'un peut venir m'aider !!

Le jeune homme afficha des yeux ronds. Ah! Des livres qui parlent!
Première réaction plutôt niaise, je vous l'accorde... même si, rassurons-nous, le nippon avait bien comprit de quoi il s'agissait dans le fond et qui hésita un instant avant de commencer à dégager les ouvrages en vitesse pour découvrir quelqu'un qui semblait étourdi là-dessous. Pas étonnant vu ce que la demoiselle en question venait de se prendre sur la tête...
Le garçon s'accroupit à hauteur de la fille qu'il venait de sauver de "l'attaque littéraire" et afficha un regard un peu inquiet.

- Est-ce que tu t'es blessée?

Ça alors... qui aurait put imaginer que ce genre d'accidents arrivaient ailleurs que dans les films? Voilà pourquoi les bibliothèques étaient malsaines, ha...!

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Haneko reprit vie au moment où l'encyclopédie qui écrasait sa poitrine fut retirée. Elle cligna des yeux plusieurs fois, lentement très lentement. Sa respiration redevint régulière puis elle hoqueta un peu. Sa tête était vraiment lourd, un mal intarissable s'était logé dans sa boîte crânienne et lui faisait l'effet d'un marteau qui enfonçait un clou. Poétique certes, mais absolument désagréable. Son poignet demeurait foulé, juste un peu de glace ainsi qu'un bandage lui ferait le plus grand bien. Elle s'asseya et tenta de se remémorer les quelques instants avant sa chute : histoire de vérifier qu'elle n'était pas amnésique en plus. L'adolescente se rappela avoir percuté une immense pile de livre et que ces derniers lui étaient tombés violement dessus. Soudain, elle percuta que sa renaissance était dû à la présence d'un autre individu qui avaient soustrait les ouvrages. Son regard se posa à sa gauche où un homme sans doute plus vieux qu'elle la regardait avec une expression qu'elle ne savait déchiffrer.

* Maintenant, il va me prendre pour une idiote qui ne sait rien faire. *

- Je…Je…Je…

Elle voulait parler mais aucun son ne sortait de sa bouche. Hane n'était pas muette, simplement effrayée à l'idée qu'un homme ait pu voir son imperfection, mais également être près d'elle. La demoiselle vit dans une okiya, une maison de geisha rempli uniquement de femmes. Les seules personnes du sexe masculin qu'elle voit ou parle demeurent les professeurs : cela reste de loin et peu de conversation sont entamées. Finalement, elle se reprit, respira amplement et déclara :

- Veuillez m'excuser d'être aussi maladroite et d'avoir dérangé votre lecture.

* Que j'ai honte. Un tel déshonneur est impardonnable *

Elle replia ses jambes vers sa poitrine et commença à se lever, encore un peu étourdie par le choc. Réparer sa bêtise restait la moindre des choses alors elle s'attela à la tâche en utilisant le moins son poignet qui la faisait toujours souffrir. Précisons que son mal de tête ne s'était pas envolé non plus. Avec uneprécision d'horloge, elle replaça l'ensemble des livres en un temps record en espérant que le jeune homme était partit. Elle prit attention à faire cette fois-ci deux piles pour que son aventure n'arrive pas à quelqu'un d'autre. Lorsqu'elle eut fini, Haneko épousseta sa jupe et se retourna vers lui.

- Veuillez excuser mon impolitesse, je ne me suis pas présentée. Hashimoto Haneko, seconde année, dortoir Musume, club cuisine.

A cela, elle ajouta un sourire aimable qui demeurait son arme quand elle était gênée. Oui, en ce moment face à celui qui, malgré les apparences, restait son professeur de cuisine : elle était parfaitement confuse. Le truc, elle ne savait pas qu'elle était devant un "sensei"…

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- C... c'est pas grave. Tu ne devrais pas plutôt t'inquiéter de toi et te reposer un peu? Après ce qui vient de t'arriver...

- Je m'appelle Yu'. Et... à vrai dire je ne lisais pas vraiment lorsque que je t'ai entendue crier.

- Et la cuisine, tu aimes ça?

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Elle se mit à réfléchir. Haneko essayait en vain de se rappeler où elle avait déjà vu cet homme, elle en était sûre : il lui disait quelque chose mais impossible de se remémorer où. Sa douleur à la tête revint tout naturellement, elle fronça les sourcils. C'était fou ce que, pour une fois, elle possédait une mauvaise mémoire concernant son interlocuteur. Elle chercha à l'associer à un club, peut être celui de théâtre ou alors de musique. Au fur et à mesure où elle se repassait en tête tous les visages, le mystère demeurait toujours aussi intact. Il n'était pas désagréable, plutôt gentil même. Ce qui bien entendu restait un trait caractéristique de sa personnalité qu'il fallait qu'elle recherche dans ses connaissances. La jeune fille remarqua qu'il se préoccupait beaucoup de sa santé. Prévenant.

- Oh. Je vois.

* Il ne faut pas que je lui parle de mon mal de tête, cela demeurait impoli de ma part. *

Il se présenta en tant que Yu'. Yu...Yutaka Shinji, le prof de musique. Oh non, en aucun cas il ne pouvait être la même personne. Cet être elle l'avait aperçut à la sortie d'un cours et ne lui ressemblait ni caractériellement ni physiquement. Alors…Ioto Yuzuru, non c'est une fille. Décidément, c'est dur.

- Enchanté de vous connaître. La cuisine est une de mes passions favorites. Je me sens parfaitement bien et détendue en le faisant, c'est un drôle de sensation. J'oublie mes soucis, mes consignes,…Je reste la jeune fille sans masque dont le seul but est de ne faire qu'un avec le fouet, d'arriver à un résultat parfait tout en y prenant un plaisir vraiment intense. Je sens que lorsque que je cuisine, je redeviens enfant l'espace de quelques minutes, je m'émerveille à nouveau devant la douceur du chocolat et il m'arrive bien souvent de me couper avec un couteau parce que j'étais plus concentrée sur le moment à contempler mon œuvre qu'autre chose. J'aime la cuisine, passionnément.

La cuisine était un sujet qui l'animait particulièrement. Au départ c'était pour se rapprocher de son idole absolue, puis elle était figurément tombée amoureuse de cet univers tellement particulier. Bien entendu personne auparavant n'avait été au courant d'une telle ferveur pour l'univers culinaire.

* Et voilà, je suis encore plus maladroite qu'avant. *

- Je dois vous paraître totalement folle à raconter de telles choses.

Elle se mit à rougir légèrement. Parler autant avec un homme la bouleversait plus qu'elle ne le voulait encore heureux qu'elle n'ait pas fui devant dès le départ. Chose qui aurait très bien pu survenir.

* J'ai complètement oublié de le remercier. Quelle idiote totalement inutile je fais !! *

- Merci encore pour m'avoir sauvé d'une mort certaine. Vous êtes mon chevalier Yu'…

Elle rigolait mais tout en voulant finir sa phrase, elle fut stopper par un flash-back. Elle préparait un plat typiquement français, une tarte aux pommes avec une boule de glace à la vanille. En tenue, avec un superbe tablier à fleur, elle coupait en quartier ces derniers lorsqu'elle se coupa par inadvertance. Elle se vit courir vers le professeur de cuisine pour lui demander d'aller à l'infirmerie en s'excusant platement de son geste. Le professeur de cuisine, Amano Yuichi. C'était lui, son sauveur.

-…sensei.

Son visage devint vide. Elle n'osait plus ajouter un mot.

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L’intérêt que porta la demoiselle à la réponse qu’elle donna à la simple question concernant la cuisine fit perdre ses mots au blond qui ne put s’empêcher de sourire cependant. Il étai sincèrement content que quelqu’un prenne à cœur sa discipline. Ca le rendait un peu fier et ça le motivait à continuer sur sa lancée d’entendre des répliques pareilles de la part d’une élève. Pourtant, dans ce qui avait été dit, il y avait quelques détails qui semblaient assez sombres, comme par exemple cette histoire de masque qu’elle enlevait l’espace de quelques heures.
Bien qu’il manquait sérieusement de tact, Yui ne put s’empêcher de vouloir cerner la personne qu’il avait en face de lui et qui semblait très largement devenir nerveuse pour pas grand-chose. Entre ses gestes et ses paroles maniérées, le jeune homme avait l’impression d’avoir affaire à une fille d’un autre monde que le sien, ce qui manqua de l’intimider à un moment donné.

Lorsque la japonaise s’excusa de son « emportement », son interlocuteur ne put s’empêcher de faire un geste de la main comme pour signifier qu’elle n’avait absolument rien à se faire pardonner. Il était largement pire qu’elle lorsqu’il s’agissait de partir dans des discours passionnés, alors bon, ce n’était vraiment pas l’expression de son bonheur lorsqu’elle cuisinait qui allait ennuyer notre cordon bleu, au contraire.

- Mais… mais non, pas du tout! C’est bien d’avoir quelque chose qui nous tient à cœur, je trouve.

Pas le temps d’ajouter un seul mot avant d’entendre des remerciements de la part de la demoiselle qui manqua sérieusement de peu de faire rougir son vis-à-vis. Qu’il était bête celui-là. Les mots qu’utilisait la brune suffisaient à le mettre un peu mal à l’aise, et ce ne fut que lorsque la phrase de l’étudiante s’interrompit pour se terminer sur un « sensei » d’un ton tout autre que celui utilisé jusqu’à présent que la personne dont il était question sentit son nœud dans sa gorge se desserrer. Il avait été stressé tellement souvent dans le passé à cause de ses difficultés d’apprentissage qui lui valaient souvent le rabaissement de la part des autres que maintenant, trop de considération à son égard le déstabilisait. C’était un peu triste à dire mais c’était comme ça… On dit que les génies sont des voitures à 3 roues, eh bien cet exemple illustrait bien Yu’.

Instinctivement, le garçon laissa échapper un rire sincère dut à son amusement devant la scène qui s’offrait à lui, et il sortit le livre qu’il tenait plaqué contre sa jambe en accordant un regard pétillant à la jeune fille qui lui faisait face. C’était rare ça, les gens qui ne se souvenaient pas de lui pourtant. Il était tellement décalé de toute la masse des enseignants qu’en général les gens ne mettaient pas plus de quelques paires de secondes avant de le reconnaître.

- Hahaha, allez, c’est rien voyons, ne tires pas cette tête là, on dirait que tu as vu un fantôme.

Poliment, le décoloré se pencha vers l’avant pour saluer son « élève » avant de jeter un coup d’œil sur son livre d’un air moyennement intéressé puis de se diriger vers la table la plus proche pour poser l’ouvrage qu’il ouvrit à l’index principal pour chercher ce qui lui fallait.
Soucieux de savoir si Hashimoto san s’était remise de son choc, le nippon jeta un coup d’œil dans sa direction avant de l’inviter à s’approcher d’un geste amical de la main.

- Je ne voudrais pas te bousculer, mais puis-ce que tu es là, tu vas pouvoir me donner ton avis sur le dessert qui te donnerait le plus envie d’être préparé pour la prochaine séance. Ces recettes viennent de France, je pense que ça pourrait être intéressant.

Il n’y avait pas que les recettes qui provenaient du pays européen, mais visiblement c’en était de même pour le livre qui les contenait. Tous les caractères étaient latins et les phrases étaient incompréhensibles pour toute personne n’ayant pas des notions francophones, ce qui n’était pas un problème pour notre grand garçon qui avait bien vécut quatre ans en Vendée et quelques autres à Paris même pour son boulot.
Mais pas panique, il y avait des belles images toutes les deux pages.

Invité

* Je n'ai jamais étudié cette langue…J'espère qu'il y a des images. *

- Cette recette a l'air exquis. Veuillez excuser mon ignorance mais je ne comprends ni ne sait lire ce dialecte…L'auriez vous appris ?
Si oui, j'aimerais bien connaître le nom de ce dessert.

- De toute manière, peut importe la recette que vous aurez choisi,
elle sera passionnante.

- La cuisine est un monde tellement vaste et plein d'aventure que chaque
recette est un nouveau défi envers soi-même à accomplir. La vie me fera croiser
le chemin de chacune d'entre elle…