Tell me why it is my life? [Libre]

Un cauchemar, encore un. Décidément, cela ne cesserait donc jamais? Cela faisait presque cinq ans qu'il n'avait pu passer une nuit tranquille sans somnifères, et sitôt qu'il s'y essayait, le résultat était toujours le même: des cauchemars, puis on se réveille en sursaut, et on ne peut même plus tenter de se rendormir, déjà qu'il a fallu attendre des heures avant de tomber de sommeil. On lui avait dit que ces insomnies ne seraient que passagères, que cela était normal qu'après sa maladie, le choc de ne plus pouvoir voir pouvait entraîner quelques dérèglements... Mais cela faisait des années qu'on le lui avait dit, et les choses ne tendaient pas à s'améliorer, au contraire, c'était même presque de pire en pire, et pourtant... Pourtant lui, il ne perdait pas espoir, s'il ne pouvait même plus dormir, déjà qu'il ne voyait plus, à quand l'heure qui viendrait ou il ne saurait plus respirer? Mais loin de lui de penser de telles choses, du moins, pas directement, il tentait de se convaincre que finalement, les médecins ont toujours raisons, et donc, un beau jour peut-être, arriverait-il à fermer l'œil sans avoir besoin de cachets assez dosés pour tuer un cheval.

Autant dire que ses pensées remuaient ce matin, tôt, alors que le jeune homme s'était levé en toute discrétion, faisant attention de ne rien heurter, et de ne réveiller personne. Guidé à tâtons dans la pénombre qui s'affichait chez lui comme le néant total, il avait pris quelques affaires, et était aller s'habiller. Aujourd'hui, il n'avait peut-être pas cours de la matinée, mais cette après midi si, et autant dire qu'il n'avait pas plus envie que cela de revenir se changer avant les cours... Il opta donc pour quelque chose de simple, de toute façon, chercher sophistiqué sans pouvoir y voir, c'était un enfer, un pantalon noir légèrement moulant tombant sur ses chaussures rehaussées d'une semelle assez haute, et une chemise blanche qu'il laissa à demie ouverte feraient l'affaire. Non il ne faisait pas chaud aujourd'hui, et l'air, il le sentait, était un peu humide, mais ce n'était pas grave, il resterait à l'intérieur. Désolé Hikari.

Tient d'ailleurs, où était-il ce fripon? Comme toujours bien sûr, couché au pied du lit du jeune nippon, comme un pacha, à n'attendre qu'une chose: l'heure de la sortie, et celle de la nourriture, car oui, il ne fallait pas s'y fier, il était peut-être tout fin, mais ses cinquante kilogrammes, il les trouvait bien quelque part! Aussitôt dit, aussitôt fait. Et une fois les deux jeunes compagnons prêts, toujours dans la plus belle discrétion possible, Ikou passa au cou du chien, le harnais caractéristique de son handicap, et nos deux amis purent enfin sortir, sans oublier pour le jeune maître, un petit sac dans lequel se trouvait un livre en braille, encore et toujours, ainsi que l'ordinateur customisé qui lui servait à faire ses cours. Canne et chien, respectivement dans la main gauche et la droite, ce n'était pas bien pratique, mais au moins, le jeune homme savait à peu près où poser les pieds...

Spoiler:

Ikou et hikari arrivèrent assez tôt dans le salon, puisque, s'il avait pu voir le monde qui l'entourait, le jeune homme se serait aperçu sans difficulté que le soleil n'était pas encore levé, et se fut un trajet sans embûche qui leur permit de venir se poser tranquillement, sur un fauteuil pour l'un et sur les pieds de son petit maître pour l'autre. Ce qui était pratique lorsqu'on lisait avec les doigts, c'était qu'avec ou sans luière, il n'y avait aucune différence, aussi, la pièce ne pouvait même pas attirer l'œil du fait que Ikou n'allumait jamais les lumières en entrant dans une pièce, cela n'avait pour lui, aucune utilité, mis à part lui rappeler qu'il était incapable de discerner la moindre lueur, et donc, lui mettre le moral au plus bas... Alors pourquoi se faire du mal savamment alors qu'on pouvait tout à fait faire autrement?...

Enfin, au bout de quelques heures, deux, peut-être même trois, de lecture, les premiers bruits se firent entendre dans le couloir, annonçant à Ikou et son ami quadrupède que les cours avaient dû commencer. Oh, il pouvait encore rester un petit peu... Après tout, rien ne pressait et puis, tant qu'on ne venait pas faire un cafarnum terrible à côté du jeune aveugle, il ne demandait rien à personne, et généralement, personne ne l'embêtait... Alors il continua sa lecture tranquillement, et tandis que les doigts de sa main gauche parcouraient silencieusement les pages du livre, il écoutait d'une oreille, le bruit de deux petites clochettes accrochées autour de son cou, qu'il secouait doucement, produisait un tout petit son très agréable, qui lui permettait de ne pas replonger dans ses pensées.

Mais malgré ce calme dans lequel le jeune homme aurait pu passer des heures, lorsque le premier cours se termina, une bande de joyeux lurons entra dans le salon, et se mit bien vite à piailler dans tout les sens, chose qui, pour l'ouïe compensant la vue du jeune homme, lui donnait l'effet d'un horrible brouhaha, et Ikou n'avait pas l'intention de finir la journée avec une migraine, lui qui en faisait très facilement depuis son glaucome, il tentait de les éviter le plus possible... Être malade, comme il l'était souvent, encore, mais vraiment, les migraines, en plus de le rendre totalement hors sujet, lui remémorait le pire mois de sa courte vie, ce mois durant lequel sa maladie fulgurant l'avait privé de sa vue... et ça, il voulait à tout prix l'éviter.

Ainsi il ne perdit guère de temps à s'attarder pour entendre ces raffut. Ses fines mains aux longs doigts effilés et délicats rangèrent ce qu'il avait sortit, et cessèrent de secouer les petits clochettes qui de toute manière continuaient leur chant à chaque mouvement du jeune homme, qui lui, attrapa bien vite le harnais du chien, et sa canne de métal, afin de sortir marcher un peu dans le couloir, malgré que ce dernier soit encore bondé à cette heure ci, habituellement lorsqu'on le voyait, on faisait attention de ne pas le bousculer, lui qui n'était pas encore très habile dans sa marche, même après plus de quatre ans de pratique... Ça, c'était habituellement, car, alors que peu à peu le couloir se vidait, et alors que le jeune Ikou errait tranquillement d'un étage à l'autre, un élève qu'il ne pu identifier débarqua en trombe... Du moins, c'est ce que pu penser Ikou en en jugeant par la vitesse de ses pas, pour filer en cours, un retardataire apparemment, seulement cela aurait été gentil, qu'en passant, il ne heurte pas l'épaule du jeune aveugle qui se retrouva alors bien vite en bas de l'escalier qu'il avait entrepris de descendre! Bien évidemment, pas sur les pieds on s'en doute, et un peu sonné, alors que sa canne avait roulé un peu plus loin, et que son ordinateur lui, avait glissé en suivant sa route tranquillement.

"Aie... "

Ça faisait longtemps tient, qu'il n'avait pas fait une petite chute, et il serait prêt à avouer que celle-ci, il s'en souviendrait... Les escaliers, lorsqu'on ne peut voir les marches, et qu'un imbécile vous bouscule, c'est.... Frappant. Secouant doucement la tête, le jeune homme passa une main dans ses cheveux décolorés, ses yeux bleu électrique semblant chercher en vain un repère, il pu bien vite retrouver d'une main, le poil doux du chien qui était revenu vers lui... Bon, maintenant, il fallait ramasser les affaires, en priant pour que l'ordinateur n'ait pas trop de dommages... On verrait après pour les bobo... Il voyait toujours après pour ça... Allez savoir pourquoi, même quand, comme ici, il s'était gentiment pris la rambarde de l'escalier contre le front et que déjà, une jolie marque perçait entre ses fines mèches de cheveux... Non, son précieux petit livre et son ordinateur comptaient apparemment bien plus qu'une paume de main ouverte ou qu'un genou brûlé... Enfin, ça, c'était le point de vue des gens, mais en réalité, il cherchait juste à ne pas penser qu'il pouvait s'être fait mal, c'est tout... Enfin, dans tout ça, il était toujours assis par terre l'air ébêté derrière ses yeux sans vie, cherchant à tâtons s'il retrouvait ses quelques affaires... Promis, la prochaine fois, il ferait attention.

Song...Shelter...

' « Cours ! Plus vite !...ils vont t'attraper...! »

Je courrais, à en perdre haleine. Impossible, ils allaient m'avoir, ils allaient l'avoir. Nous serons perdus...Tout est fini...Je me retourne et là, je le vois. Un sourire carnassier sur son visage, une batte à la main, ses acolytes derrière lui, tenant mon ami.

« Laissez-le ! »

Un rire rauque et cruel résonne dans la petite ruelle sobre...Il lève sa main et l'abat sur moi...Noir...Il fait complètement noir devant mes yeux. C'est à ce moment où je pus affirmer que...oui, effectivement, tout est fini.'

Gigotant dans son lit, Shuichi se réveilla en sursaut. Passant sa main à travers ses cheveux, il soupira silencieusement. Voyant qu'il faisait encore nuit, il jeta un rapide coup d'œil à son réveil. 4H12...génial...Ce n'avait été qu'un cauchemar...Chose qu'il n'avait pas fait depuis très longtemps. Drôle de cauchemar d'ailleurs. Secouant à nouveau sa tête, il se leva, le plus silencieusement possible et se dirigea d'un pas lent vers la salle de bain. Allumant l'eau, il remplit un verre. S'appuyant sur le rebord du lavabo, il regarda son reflet dans le miroir. Une horreur...Ses yeux étaient soulignés de cernes, sa peau diaphragme. Il se trouvait horrible. Baissant les yeux, il but d'un coup son verre d'eau et alla se recoucher le plus vite possible. Sous la couette, il ferma les yeux, essayant d'oublier et de se rendormir. Peut-être allait-il aller cette fois au pays des merveilles ? En tout cas, il l'espérait.

Un rayon de lumière filtrait à travers les épais rideaux de sa chambre. Il était encore tôt. Trop tôt à son goût. Ouvrant difficilement les yeux, il s'étira comme un chat. Un sourire béat s'afficha sur ses lèvres...il avait bien dormis...hormis les premières heures...Se tournant, il plaça son bras sur ses yeux et émit un soupir d'aise...Rester encore quelques minutes comme ça...pour profiter...Shuichi était tellement paresseux et aimait tellement rester coucher... Toujours le dernier à se lever, pouvant paresser pendant des heures dans son lit, jusqu'à que la faim le prenne ou d'autres envies.. Tout à coup, il sentit quelqu'un le secouer...C'était brusque, sans douceur...Enfin, une voix atteignit ses oreilles.

« Chi-chan ! C'est l'heure, tu vas être en retard ! Lève-toi, où je t'envoie mon ballon... »

Quelle gentillesse...C'est à ce moment-là qu'il se rendit compte qu'il commençait dans moins d'une demi-heure...Ah maudits cours qui ne le laissaient pas dormir !...Ouvrant grand les yeux comme s'il venait de recevoir une claque, il sauta de son lit d'un geste souple et alla s'enfermer dans la salle de bains, faisant râler ses colocataires. Faisant sa besogne dans un temps record pour lui, il prit son sac à la volée, ses chaussures encore ouvertes et partit en courant dans le couloir...Quelques enjambées plus tard, il se retourna et alla devant la porte de sa chambre. Il l'ouvrit et chercha ses lunettes, posées sur sa table de chevet. Resortant, il chercha les clés et ferma la porte rapidement.

Spoiler:

Reprenant sa course, il prit un raccourcis. Montant quatre à quatre les marches, il aperçut un chien...Stoppant net, il regarda de plus près...Un chien ? Dans leur locaux ? Il continua quand il vit le maître de ce chien tomber dans les escaliers à cause d'un élève en retard. Une belle chute. Ce dernier ce releva l'air de rien et ramassa ses affaires. Il n'avait pas bronché, pas émit une protestation, ce qui laissa Shuichi coït. Après un moment, toutes ses affaires étaient rangées, et il cherchait sa canne. Shuichi alla la prendre et la lui tendit. Voyant qu'il était surement aveugle, tout s'expliqua dans son esprit. Prenant la main du jeune homme, il lui mit sa canne dedans.

« Vous allez bien ? Rien de casser ? »

C'est en prenant sa main qu'il découvrit que sa paume était ouverte. Ouvrant la bouche, il la referma bien vite et prit un mouchoir dans sa poche, épongeant sa paume. Il chercha d'autres endroits blessés et remarqua son genoux. Il essaya d'enlever le sang, mais elle était bien trop grande pour qu'il puisse faire quelque chose.

« Tu devrais aller à l'infirmerie...Tu peux pas laisser tes blessures à l'air comme ça. Si tu veux, je t'accompagne... »

Temps pis pour son cours. Il n'était pas très important. Ce prof l'assommait considérablement et pour lui, son cours n'était pas plus intéressant que s'il restait au lit...il se demanda tout à coup, pourquoi, il s'était tant pressé... Et puis, il préférait sauver quelqu'un en détresse. Cette phrase le fit rire lui-même. Le jeune homme n'était pas vraiment en détresse, mais plutôt bien arrangé. A cet instant, il aurait bien voulu « gueuler » contre l'inconscient qui l'avait poussé. Le scrutant un peu plus, profitant aussi du fait qu'il était surement aveugle, il put voir ses traits fins. On avait du mal à savoir s'il était vraiment homme. Oui...il se rappelait maintenant...un élève dans son dortoir était aveugle...Comment n'avait-il pas pus s'en rappeler immédiatement...Quelle honte, il se blâma...Mais il faut dire que le jeune homme était plutôt du style discret.
Il remarqua que ses cheveux blonds laissaient apercevoir une tache qui commençait à devenir rouge...Une goutte de sang perla sur son front. Ouh...ça, ça devait faire mal. L'épiderme crânien était si fragile, qu'au moindre coup, il s'ouvrait et saignait abondamment. Prenant son mouchoir, bien taché maintenant, il lui épongea le front puis, le lui maintenait sur ce qui ressemblait à la naissance de la blessure.

« Garde le mouchoir. Tu peux te relever ? »

Il lui prit un bras, son sac et la lanière du chien et le redressa. Il adressa un sourire au canin et mit sa lanière dans la main de son maître. Souriant, même sachant que le jeune homme ne le voyant pas, il haussa la lanière du sac sur son épaule et entraina le jeune homme, doucement, à sa suite...

« Allez viens... »

Song, like a requiem.

Alors que le jeune homme cherchait sa canne, encore un peu sonné, sans risquer de la trouver à cause du fait que cette dite canne avait roulé plus loin qu'il ne le pensait, un bruit de pas attira son attention, le faisant stopper un instant tout geste et relever la tête, comme s'il cherchait l'origine de ce bruit, très léger certes, mais bien présent. pourtant lui, ne tenta pas de se faire remarquer, peut-être qu'au fond, il n'avait pas spécialement envie qu'on le trouve dans cette situation... plutôt déprimante et déplorable. Mais que voulez vous, il ne pouvait rien y faire, c'était plutôt à cet étudiant qui l'avait plus ou moins poussé dans sa course qu'il fallait dire quoi que ce soit... Et pourtant non, alors qu'il aurait pu jurer contre la tête de cet élève, le jeune homme n'avait strictement rien dit, tellement habitué à se taire sur bien des choses que cela ne lui avait même pas traversé l'esprit. Après tout, il était encore en vie, alors pourquoi en vouloir à cet inconnu qu'il ne reverrait certainement jamais, et qui plus est, qui n'avait peut-être même pas fait exprès... Il aurait quand même pu s'arrêter certes, en voyant qu'il avait heurté quelqu'un, mais soit, nous n'avons pas forcément tout la même idée du bon sens...

Mais les pas entendu quelques secondes plus tôt ne semblaient pas décidés à ignorer Ikou, étant donné que ce dernier les entendit approcher... Il n'eut pas le réflexe de dire quoi que ce soit, mais manqua un sursaut lorsqu'on lui redonna sa canne, et qu'une voix s'éleva non loin de lui. C'était une voix connue... Non, pas vraiment, disons qu'il l'avait déjà entendu quelques fois, lui qui observait le monde qui l'entourait de par ses sons, c'était peut-être un peu normal, il l'avait certainement déjà croisé dans un couloir, ou quelque chose comme ça... Il ne souriait pas, restant neutre, comme souvent, tandis que son esprit remettait un peu d'ordre dans ses idées, et ce fut sur un ton on ne peut plus poli qu'il répondit à la question de l'inconnu:

" Oui, ça va, c'est juste une petite chute, rien de grave. "

Une "petite" chute d'une dizaine de marches tout de même... Il n'eut pas vraiment le temps de refermer sa main contre sa canne qu'on passait ce qui lui sembla être un mouchoir contre la paume... Saignait-il? Peut-être, même si lui, tout ce qu'il pouvait savoir c'est que, passé le choc, ça brûlait, quoi de plus normal? Le reste, il n'en savait trop rien, à moins de toucher lui-même, chose qu'il n'avait pas vraiment l'intention de faire, mieux valait se voiler la face.
Si le jeune homme n'était pas arrivé, sans doute même que Ikou serait retourné dans son dortoir sans rien toucher, et peut-être qu'en arrivant là bas, il aurait tenté comme faire se peut, de soigner un peu tout ça, sinon, tant pis. Voilà que le jeune inconnu lui disait d'aller à l'infirmerie... Ce qui était loin d'enchanter Ikou qui devait déjà y aller chaque jour pour ses médicaments qu'il n'avait pas le droit de garder avec lui, mais pourtant, il ne fit que hocher calmement la tête, en signe d'accord! C'est qu'en plus d'être très discret, il possédait une profonde réserve de sentiments, et de manière générale, ne refusait jamais rien, surtout quand comme dans le cas présent, c'était plutôt une bonne résolution... Cependant une réflexion lui vint assez rapidement à l'esprit, si ce jeune homme était là, il devait bien y avoir une raison...

" Mais vous n'avez pas cours... Il ne faut pas se mettre en retard pour moi... "

Oui, il le vouvoyait, encore et toujours cette habitude de vouvoyer tout le monde, sauf les petits enfants certes. La politesse, ainsi qu'une sorte de soumission systématique, voilà ce qui guidait les paroles du jeune aveugle, mais cela, il ne le disait pas, et même, ne se l'avouait pas à lui-même alors ce n'était pas peu dire! Cependant, c'était vrai, ce jeune homme ne devait pas se mettre dans une situation embarrassante avec un quelconque professeur, s'il avait cours, autant qu'il y aille non? enfin, ça c'était ce qu'il se passait dans l'esprit du jeune homme, qui tentait toujours de ne pas être un poids pour qui que ce soit... il l'était déjà bien assez pour son père, pas la peine de le devenir pour qui que ce soit d'autre...
Mon dieu, lui qui tentait toujours et à tout pris d'éviter un quelconque mal de crâne, aussi petit soit-il, il était servi. C'est vrai que sur le coup, on ne sent pas toujours la douleur, mais lorsque celle-ci arrive et vous rappelle à la dure réalité des choses, c'est assez désagréable, et pourtant, là encore, il ne bronchait pas, se contentant de garder un visage aimable malgré l'absence constante du moindre sourire, chose qu'il ne savait plus vraiment faire envers qui que ce soit, mis à part peut-être pour le berger qui partageait ses journées, mais il était la seule exception, le seul être en qui Ikou avait pu laisser sa confiance sans avoir peur d'être trahi.

" Oui oui, ça ira. Merci. "

Récupérant la lanière que le jeune homme lui donnait, alors que Hikari avait enfin cessé de tourner en rond d'un air inquiet, le jeune homme se releva, lentement pour éviter de retomber, son air un peu déséquilibré additionné à son apparence frêle habituelle pouvant presque donner l'impression que notre jeune androgyne allait tomber et se casser d'un instant à l'autre, il suivit calmement le jeune homme qui s'était apparemment entêté à l'accompagner... On ne dirait peut-être pas comme cela, mais cela faisait plaisir à Ikou au fond, lui qui avait, en ce moment, du mal à rester tout seul, une présence pas loin n'était pas de refus, même s'il essayait de ne pas le montrer, c'était indéniable. sans s'arrêter, mais histoire de ne pas laisser un silence trop pesant s'installer, le jeune aveugle dit, toujours sur son ton calme et un peu réservé:

" Je m'appelle Madayade Ikou... lui c'est Hikari... Et, merci pour l'aide... "

Hikari, il portait bien son nom l'animal, lui qui représentait la lumière pour Ikou, certaines personnes trouvaient cela ridicule... Elles pensaient bien ce qu'elles voulaient, ce n'était pas les affaire du jeune homme qui considérait vraiment le quadrupède comme son meilleur ami, voire même, sa deuxième moitié... Et pour ce qui était du remerciement, il avait laissé échappé cela, mais au delà de "l'aide" justement, c'était surtout pour sa présence qu'il aurait voulu remercier le jeune homme, mais cela, il ne le précisait pas, après tout, ce n'est pas tout le monde qui s'accroche à de telles futilités n'est-ce pas? Enfin, pour le moment, il tâchait de ne pas retomber, tentant de se focaliser sur autre chose que sur ses plaies qui semblaient bien décidées à le brûler... Ses yeux au regard mort ayant toujours cette tendances à remuer dans tous les sens, comme pour cherche une lumière introuvable, ça pouvait presque en être stressant, mais cela, Ikou ne s'en rendait guère compte...

Ahh mon Dieu, ces jeunes ne feront-ils jamais attention ? Il cherchait sa canne jusqu'à ce que Shuichi, la lui tende. Il ne pouvait décemment pas le laisser là. Le pauvre, il allait se faire écraser. Le relevant doucement, il l'entendit dire qu'il n'avait fait qu'une petite chute...évidemment...Une petite...Shuichi esquissa un sourire et dit sur un ton un peu réprobateur :

« Elle n'était pas petite du tout...Mais tant que tu es entier, tout va bien... »

Son handicap n'enlevait rien à sa beauté. Suichi esquissa un sourire et lui proposa d'aller à l'infirmerie. Mais il refusa, ne voulant pas le retarder dans ses cours. Il pensa au professeur de coréen, qui avait sa classe presque toujours en premières heures et la plupart du temps, soit Shuichi dormait soit était en retard...Et oui...c'est pas comme ça qu'il aura son diplôme. En réalité, il savait qu'il n'aurait aucun mal à réussir.

« Mes cours ? Bah j'étais déjà en retard, alors que j'y sois ou pas, ça change rien...Et puis, je préfère aller avec toi »

Le fait que le jeune homme le vouvoyait le gêner un peu. Après tout, ils devaient avoir le même âge, et il n'était surement pas plus sage que lui...donc...
Il lui donna doucement la laisse du chien quand le jeune homme se présenta. Madayade Ikou et le chien. Hikari. Ce chien portait bien son nom. D'ailleurs il remuait de la queue, et tirait doucement son maître en direction de l'infirmerie. On aurait dit qu'il était d'accord avec Shuichi.
Ikou le remercia de son aide. Shuichi sourit mais ne répondit pas...Après un moment, il se présenta tout de même.

« Désolé...Moi, c'est Shuichi ...Ueno Shuichi...mais Chi-chan suffira. Je fais partie du club de foot. »

Il ferma les yeux quelques minutes et essaya de se souvenir où il était …Il avait entendu parler de lui...mais où était-ce ? Il n'était pas en foot, là il le saurait...Pas basket...ni Baseball...Il aurait du mal à voir la balle et même avec un remarqueble don, c'était juste umpossible. Rester l'athlé...Oui, ça devait être athlétisme...N'empêche, Shuichi pensa qu'il devait petre sacrément bon pour être dans l'équipe et ne pas voir ce qu'il faisait. Ses sens avaient surement du se développer certes, mais tout de même. Il eut à cette instant, un élan de fierté...

« Tu es...En...Athlé non ?

Il espérait ne s'être pas trompé, sinon il aurait bien honte. C'est à ce moment qu'il remarqua combien il n'était pas proche des autres dans son dortoir. Au fur et à mesure, cela aller, mais les préjugés concernant sa sexualité gâcher tout. Il tira délicatement la manche d'Ikou et l'entraina à travers les dédales du lycée, portant toujours son sac.

Le reste du chemin se fit dans le silence. Ni l'un, ni l'autre ne voulant le briser. Ils arrivèrent assez vite devant la porte de l'infirmerie...Toquant quelques coups, Shuichi demanda s'il y avait quelqu'un. Mais aucune réponse ne se fit donner. Entre-ouvrant doucement la porte, il jeta un regard à l'intérieur de la pièce. Se retournant vers Ikou, même si cela n'était pas nécessaire il dit, sur le ton de la confidence.

« Il n'y a personne...Bon temps pis... »

Prenant sa main, il le tira à l'intérieur, le chien suivant. Il le fit s'asseoir et commença à farfouiller dans les tiroirs. Au bout de quelques minutes , il trouva ce qu'il cherchait. Un désinfectant et des bandages. S'accroupissant, il lui dit de ne pas s'inquiéter et qu'il allait faire les bandages. Il prit le désinfectant et doucement en mis sur les plaies.

Désolé du retard, mais j'ai été très pris avec les cours ses derniers temps...Gomen n_n

Song, like a Requiem.

Un sourire aurait pu étirer les lèvres du jeune homme lorsque le second lui avait répliqué que sa chute n'avait pas été petite du tout, mais il n'en fut rien. Le jeune aveugle resta neutre, penchant légèrement la tête en entendant cette remarque, l'air consentant, comme pour dire sans user de mots, que ce jeune homme pouvait bien penser ce qu'il voulait, cela revenait au même de toute manière: il était tombé, point barre, mais ce jeune homme en face de lui avait raison, il était encore entier, alors raison de plus pour dire que cela importait peu après tout! C'était un peu gênant d'être ainsi tombé et de se retrouver dans un tel état devant un parfait inconnu, du moins, selon Ikou, en effet, il avait pour habitude de ne jamais se plaindre, ce qui pouvait, dans des cas comme celui ci, se remarquer aisément, alors attirer l'inquiétude des autres était loin d'être dans ses préceptes!

A la réponse du jeune homme sur le fait que ce dernier préférait raccompagner Ikou à l'infirmerie plutôt qu'aller en cours, l'aveugle, encore une fois, ne répondit rien, non, après tout, ce jeune étudiant faisait bien ce que bon lui semblait! Et puis, lui-même, lorsqu'il voulait faire quelque chose, il ne revenait pas sur ses décisions, alors imaginons que ce soit aussi le cas de ce nouveau venu... Cela ne servait à rien de le forcer à faire quelque chose qu'il ne voudrait pas! Ikou se contentait pour le moment d'observer ce jeune homme... l'observer... A sa manière bien sûr: par ses dires, son timbre de voix, les gestes qu'il faisait envers lui, bref, tout ce qui pouvait combler son manque de vue. Après tout, ne dit-on pas que dans le moindre souffle on peut entendre les sentiments d'une personne, quelle qu'elle soit? C'était en partie l'une des raisons pour laquelle il était très difficile de mentir au jeune nippon, car mentir n'est pas naturel, et la voix s'en ressent, ainsi, il ne met guère longtemps à comprendre que quelque chose va de travers, et puis, même s'il ne s'en rend pas compte tout de suite, notre jeune homme a tellement l'habitude d'observer son monde par les sentiments d'autrui, qu'on ne peut rien lui cacher.

Lorsque le jeune homme se présenta, Ikou eut un petit hochement de tête, murmurant un poli "enchanté" comme le voulait l'usage, toujours un peu, voire très discret. ainsi donc ce jeune homme s'appelait Suichi? D'accord, il s'en souviendrait, promis, maintenant qu'il pouvait mettre un nom sur une voix, c'était tout de même mieux pour réussir à poser quelques repères de ci de là! Et il était au club de foot? Ah, cela éclairait un peu le jeune aveugle, pour qui la voix de cet étudiant semblait connue, en effet, il devait l'avoir déjà entendu au détour d'un couloir, aux dortoirs par exemple, certainement. C'était peut-être un petit inconvénient d'avoir des sens très développés pour compenser un manque... Il y avait tant de choses que l'on entendait, voyait, ou sentait, sans jamais pouvoir les relier à une image... C'en était frustrant par moment!

Il y eut un silence, assez long mais pas pesant, ce n'était donc pas un silence de gène, tandis que les deux jeunes gens continuait le chemin vers l'infirmerie, alors Ikou ne le rompit pas... Le silence, lorsqu'il n'est pas alourdi d'un sentiment gênant n'est pas désagréable au contraire, et puis, les petites clochettes autour du coup de l'aveugle continuaient de résonner doucement au rythme de leurs pas, laissant tinter une petite chansonnette bien agréable. Enfin, la vois dudit Suichi s'éleva de nouveau dans le couloir, lâchant une question à notre jeune aveugle, qui ne tarda pas à répondre posément, calme et toujours dans sa douceur discrète qui lui était si caractéristique:

" Oui, je suis en athlétisme, bien trouvé! "

Il n'était pas froid dans ses propos, pas ironique, pas moqueur, non, juste naturel, un peu amusé peut-être, mais semblant heureux. Pour une fois que quelqu'un lui demandait ça sans avoir un air trop sceptique! en effet, bien du monde ne voulait pas croire Ikou lorsque ce dernier disait qu'il suivait des cours d'athlétisme, en effet, cela paraissait étonnant pour un aveugle... Mais ses cours à lui se limitaient à une activité, la course, avec l'aide de son chien, qui semblait apprécier particulièrement ce genre d'activité... Il fallait voir ce que savaient faire nos deux complices pour comprendre que Ikou ne mentait pas! Cela faisait des années que le nippon avait intégré l'animal à ses cours, et jusqu'à présent tout ce passait bien, alors il n'y avait pas de raison d'arrêter n'est-ce pas! D'accord, il semblait étrangement fin, maigrelet, pour un sportif, et alors? C'était un peu la même chose que son androgénie à bien regarder... Et à un autre niveau, certes!

Arrivé devant l'infirmerie, le jeune homme se stoppa, laissant l'honneur à Suichi, de frapper à la porte... Mais il n'y avait apparemment pas de réponse, et les pensées du jeune aveugle furent bientôt confirmées par la voix de son camarade, qui pourtant, l'entraîna à l'intérieur de la pièce sans vraiment lui demander son avis! Et bien d'accord, il suivit sagement, s'asseyant là où on le lui demanda, n'ayant guère d'autre choix que de faire "confiance" dans les geste de l'autre étudiant. Le chien ne perdit pas un instant pour s'asseoir à côté, semblant surveiller les deux jeunes hommes, d'un air aussi calme que joueur. Prions pour que les désinfectants ne piquent pas... Oh, et puis de toute manière, Ikou n'aurait rien dit, on le connait n'est-ce pas?..
D'un air un peu gêné, mais toujours très calme, ses yeux clairs et voilé posé sur le mur d'en face, lui donnant l'air toujours un peu déconnecté du monde, quelques peu triste aussi:

" Je suis vraiment désolé, pour le dérangement... J'aurais dû faire un peu plus attention... "

Non, il ne fallait pas chercher, c'était une habitude chez Ikou, de toujours rejeter la faute sur lui-même, jamais sur les autres, contrairement à bien des gens... il prenait tout pour son compte, un jour, cela finirait par lui jouer un mauvais tour, c'était certain! Et puis, il était sincère en plus, dans ses propos! De plus, avouons le, notre jeune efféminé ne voulait pas vraiment laisser le silence s'installer entre eux deux, dans cette pièce qu'il connaissait bien, trop bien, et qui lui faisait parfois un peu peur. Ses iris sans pupille bougeaient fébrilement, semblant chercher encore et toujours, quelque part où se poser, sans trouver quelconque perchoir, comme toujours.

" Ça m'apprendra. "

Auto flagellation, oui oui, sur le ton de la plaisanterie, aussi, mais c'était pensé, ce n'était pas vraiment pour rire contrairement à ce qu'il voulait faire penser, mais enfin, espérons que cela ne se voit pas de trop, après tout, ce jeune étudiant avait l'air bien sympathique, alors il ne fallait pas le faire fuir au bout de cinq minutes... Si?

Spoiler: